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Une enquête menée auprès des enseignants de la Fédération Wallonie-Bruxelles démontre que 6,6% d’entre eux se sont déjà auto-censurés, évitant d’aborder certains sujets éthiques ou scientifiques pour éviter de froisser leurs étudiants. Soutenir les enseignants face à cette situation est une nécessité.

Il y a environ un an, en mai 2021, la ministre de l’Éducation Caroline Désir refusait de mener une enquête sur l’autocensure des enseignants en Fédération Wallonie-Bruxelles, alors qu’une enquête (Ifop) révélait, suite à l’assassinat du professeur d’histoire Samuel Paty, que près d’un enseignant sur deux s’autocensurait en France. La ministre estimait que cette étude portait sur les contestations de la laïcité et sur le séparatisme dans un contexte politique spécifiquement français et que, de ce fait, il n’était pas opportun de diligenter une étude ou une enquête sur cette question et encore moins d’envisager des mesures pour réinstaurer un climat plus serein.

« Cette réponse de la Ministre Désir m’a semblé insuffisamment prendre en compte la réalité de cette problématique », déplore la députée MR Stéphanie Cortisse. « En effet, une autre enquête menée par le Centre d’action laïque révélait peu après qu’en Fédération Wallonie-Bruxelles, 40% des enseignants interrogés avaient déjà renoncé à aborder un sujet ou décidé d’en limiter le champ de réflexion. 60 % des enseignants ressentaient une augmentation des remises en question et rejets pour les sujets entrant en confrontation avec les croyances des élèves ».

Finalement, Caroline Désir a changé d’avis et une enquête réalisée par le Service Général de l’Inspection (SGI) s’est déroulée durant l’année scolaire 2021-2022. Elle a concerné 2.300 enseignants. Selon cette enquête, 6,6% des répondants déclarent éviter ces thématiques qui leur semblent problématiques. Un pourcentage bien inférieur à l’étude du CAL, ce qui peut s’expliquer par le timing (celle du CAL d’est déroulée juste après le meurtre de Samuel Paty et celle du SGI s’est déroulée l’année scolaire suivante) et par la portée et l’ampleur de l’enquête (300 répondants dont 90% du réseau WBE pour l’enquête du CAL, et 2.300 tous réseaux confondus pour l’enquête du SGI).

« Quoiqu’il en soit, 6,6% c’est trop ! Et l’on ne peut accepter que des enseignants n’osent pas aborder des sujets comme l’évolution des espèces et l’origine de la vie et de l’univers, les différents registres de discours et types de vérités, les rapports à l’autre dans ses différences culturelles, ethniques ou religieuses, l’orientation sexuelle et l’identité de genre, l’égalité entre les humains et les totalitarismes et la démocratie », déclare Stéphanie Cortisse.

Pour la députée francophone, les enseignants doivent pouvoir s’exprimer librement et aborder tous les sujets avec leurs élèves. « Ces questionnements sont de plus en plus fréquents et fortement présents dans le débat public et nos enseignants doivent être en mesure de les adresser avec discernement, respect et neutralité, mais aussi sérénité », estime Stéphanie Cortisse. « Maintenant que la problématique a été objectivée par une étude propre à la Fédération Wallonie-Bruxelles, il faut travailler sur des outils et des formations permettant de ne plus laisser les enseignants en désarroi éducatif face à cette situation ».

Le SGI formule à cet égard les recommandations suivantes au Gouvernement : mettre en place des formations et favoriser la participation des enseignants à des formations professionnelles continuées disciplinaires et interdisciplinaires en lien avec la question de la contestation des savoirs ; centraliser sur le site E-Classe pour chaque discipline les ressources actualisées existantes dans les mondes associatifs et culturels ; et enfin produire à l’attention des enseignants des ressources spécifiques aux savoirs faisant l’objet d’une autocensure et d’une contestation.

« A mon sens, notre enseignement se doit d’être à même d’ouvrir l’esprit critique de nos enfants et de nos jeunes », conclut la députée. « À chaque cours, il est possible d’ouvrir ces débats (lors de l’éducation à la philosophie et à la citoyenneté, des cours de morale et de religion, mais aussi lors des cours d’histoire, de biologie, de français…). Dans l’EPC, il faut de vrais espaces de dialogue pour penser, se décentrer, débattre dans le respect et avec un encadrement professionnel garant de la sérénité ».

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